La matinée a été normale, les cours étaient ennuyeux. Les maths, c'était bien, mais cela lui servirait à rien, Michiru n'avait pas le caractère qu'il fallait pour pouvoir être scientifique. Pendant les cours d'histoire, elle était limite en train de pioncer, pas que parce qu'elle était fatiguée à cause du travail, non mais parce que l'histoire ne l'intéressait pas. Le passé n'était pas quelque chose d'important, le futur encore moins, et ne parlons même pas du présent. La plupart du temps, elle était assise à rêver, elle se voyait allongée sur la pelouse en train d'admirer les étoiles, ou à attendre les étoiles filantes. D'ailleurs, elle se demandait des fois pourquoi était elle en vie et pour quoi faire. Elle avait un don, qui lui était totalement inutile. Mais d'un coté, elle ne cherchait pas à savoir pourquoi elle avait eu ce don.

Ce matin là, elle n'avait que quelques cours, lorsque la sonnerie annonçant la pause déjeuner, retentit, elle rangea ses peu d'affaire et sortit de la salle. Michiru se dirigea dans le parc juste à coté de Todai. C'était là qu'elle passait son midi. Aujourd'hui, elle n'avait pas faim, donc elle se contentait de s'allonger sur le banc et d'observer le ciel. Certes, il y avait du vent, mais elle aimait les lieux aérés, donc le froid ne la dérangeait pas. Michiru était la seule à être dans le parc par ce temps là, bien qu'elle ne s'était pas habillée chaudement, elle n'avait pas froid. Elle avait l'habitude de rester seule lors des pauses déjeuner, elle serait même pas très à l'aise si des personnes se joignaient à elle. De toute façon, c'était impossible, personne ne l'appréciait et elle ne faisait pas les choses pour l'être. Le sandwich qu'elle s'était fait le matin, elle allait le gardait pour le soir, peut être qu'à ce moment là, elle aurait faim. Elle avait presque oublié qu'il fallait qu'elle travaille ce soir.
L'heure passa, Michiru devait aller en cours. Les cours de l'après midi était autant ennuyeux que ceux de ce matin. Par envie, elle prenait des notes et si l'envie passait, elle regardait en direction du professeur en ayant le regard vide. Faire le vide dans sa tête était très facile pour elle, elle le faisait très souvent même. Mais ce n'était pas parce que l'asiatique ne prenait pas de note qu'elle était nulle en classe. Bien au contraire, elle arrivait à suivre le rythme de la classe, c'était surement quelque chose qu'elle acquit grâce à son passé. Comme elle préférait la discrétion, elle n'était pas vraiment à fond lors des examens. Sauf celui sur l'astronomie, elle ne pouvait s'empêcher de tout bien répondre, ce qui laissait les autres un peu perplexe. Être le centre d'attention des autres n'était rien de bien, lorsqu'on était trop bon, il y avait toujours de la jalousie et de la haine ou alors une foulé de personne qui l'admirait. Enfin, c'était ce qu'ils laissaient paraître, mais en leur fort intérieur, ils ne souhaitaient que l'échec du premier. C'était ça la nature humaine. Michiru n'avait pas peur, non, c'était juste qu'elle ne voulait avoir des liens avec les autres, elle finirait surement blessée ou déçue comme avec ces propres parents. Il y avait aussi d'autres raisons pour avoir ce caractère, mais c'était la principale.

Lors de la pause, une jeune insouciante l'interpella, elle voulait lui demander son nom et tenter une amitié. Michiru, la regarda avec sa mine de dépressive pour savoir qui lui parlait. Très vite, les amies de l'insouciante l'éloignèrent de Michiru, on pouvait entendre d'elles qu'il ne fallait pas parler à Michiru, qu'elle était bizarre. Ce n'était pas la première fois qu'elle entendait cela, elle ne se laissait pas se faire blesser avec de simples paroles, d'ailleurs, rien ne pouvait la toucher, la blesser. Elle ne se concernait pour rien. L'après midi se passa aussi vite que la matinée. Michiru n'avait pas besoin de rentrer chez elle avant d'aller à son travail, de toute façon, elle n'avait rien à faire chez elle. La nippone marcha donc en direction du métro pour aller à son travail. C'était un restaurant japonais, pas très chic, mais assez connu. Bien que le métier de serveuse n'était pas fait pour elle, il fallait qu'elle garde son travail. L'argent laissé par sa grand mère était suffisant mais elle n'aimait pas dépendre des autres.

Arrivée à son travail, elle entra par la porte de derrière, elle salua avec la tête les autres employés. Michiru se dirigea vers les vestiaires, elle avait son propre casier, elle y laissait son sac et ses habits. La nippone avait un uniforme de travail, comme tout les autres restaurants. Elle avait une chemise blanche où elle accrochait un badge avec son nom, avec un bas noir mais légèrement caché par le tablier bordeaux. Pour travailler, Michiru préférait s'attacher les cheveux, c'était moins gênant pour elle et plus hygiénique pour le restaurant. La pour l'instant, vu que ce n'était pas l'heure habituelle pour manger, elle s'occupait à nettoyer tous les couverts et co. Alors que les autres étaient en train de discuter.

Il était maintenant 19h30, le restaurant avait ouvert il y avait plus d'une heure. Quelques personnes étaient déjà entrées mais pas beaucoup. C'était à partir de cette heure là que le monde arrivait. Sa tache d'aujourd'hui, s'était de ramener les plats de la cuisine aux clients et vice versa. Son patron avait compris qu'elle ne parlait pas beaucoup, et avec son caractère, elle ne pouvait que faire fuir les clients.

Une heure trente passa, vus qu'il avait de plus en plus de monde, Michiru devrait s'occuper de placer les nouveaux clients. Lorsqu'on lui annonça que quelqu'un entrait, elle prépara la carte des plats puis se retourna vers l'entrée. C'était le client qui était bizarre. La nippone sortit un petit 'bienvenue' avant de se courber par politesse. Le nouveau venu lui indiqua qu'il était seul. Michiru l'accompagna donc à une table ronde. La jeune fille lui donna la carte du menu.

« Je vous laisse choisir, je vais appeler quelqu'un pour vous prendre commande. »

Surement une des premières paroles prononcés de la journée. Des fois, elle était bien obligée de parler, surtout que son patron était en train de la fixer.

Depuis qu'il était arrivé au Japon, Mikio se faisait un réel plaisir d'aller au restaurant régulièrement. Il en avait déniché un sympathique non loin de son lieu de travail, et il s'y rendait souvent après la fin de son service. Et puis, avec l'argent mensuel que lui envoyaient ses parents, il pouvait se permettre de faire quelques écarts. En fait, avec la somme qu'il recevait, il n'était pas obligé de travailler mais c'était un tel plaisir de travailler avec les animaux qu'il s'était laissé tenter par l'offre du vieil homme qui tenait l'animalerie. En effet, seulement deux jours après son arrivée à Tokyô, il s'était rendu dans la première animalerie qu'il avait trouvé près de son quartier et le vieillard, tout en bavardant avec lui, semblait avoir remarqué le feeling qui existait entre Mikio et les animaux. Il était resté plus d'une heure dans la petite boutique alors qu'il était au départ venu uniquement acheter un paquet de croquettes pour son chaton. Le vendeur l'avait observé se faufiler de cage en cage, parler aux bêtes, leur sourire, leur parler finalement comme s'ils le comprenaient et leur répondaient. Il avait trouvé cela étrange, quand il leur disait quelque chose, il entendait tout de suite après un miaulement, un jappement, et Mikio se remettait à parler. Ainsi il avait fini par lui proposer de travailler avec lui en tant qu'assistant, ce qui lui permettrait, à son grand âge, de se soulager un peu de certaines tâches et de prendre des jours de repos. Jusque là il n'avait jamais osé confier cette tâche à quelqu'un, n'ayant confiance en personne pour s'occuper de ces animaux, mais ce Mikio l'avait épaté et il avait été charmé par sa capacité à se faire apprécier des animaux.
C'était donc comme cela que le jeune nippon-américain avait commencé à travailler pour Monsieur Matsumoto. Et il n'était pas déçu du résultat ! Pas plus tard qu'hier, il avait fait la connaissance avec une agréable cliente du nom de Takeda Aoi. Elle aussi avait l'air d'apprécier les animaux, surtout son chat pour qui elle était venue faire ses emplettes.

En bref, ce soir-là il finissait vers dix-huit heures, mais il avait tenu à faire du zèle et à rester jusqu'à vingt heures. Le patron, assez surpris de la volonté de Mikio, avait accepté, même s'il doutait que des clients se pointent entre dix huit et vingt heures. Il avait quitté la boutique et avait laissé le jeune homme seul en compagnie des animaux. C'était donc lui qui ce soir s'occuperait de nourrir les animaux et de vérifier qu'ils étaient bien installés pour dormir.
En vérité, s'il avait décidé de rester si tard, c'était qu'il avait décidé qu'il retournerait manger à ce fameux restaurant ce soir. Ce dernier servait de la nourriture typiquement japonaise, ce qui le ravissait puisqu'il pourrait découvrir les plats de son pays d'origine à son rythme. Bien sûr, cela lui changeait radicalement des hamburgers et autres produits issus de la restauration rapide auxquels il s'était accoutumé, mais ce changement n'était en rien déplaisant.
Et comme le restaurant se situait à proximité de l'animalerie, il était franchement inutil de faire un aller-retour jusqu'à chez lui et revenir, autant manger chez lui. Le temps qu'il rentre en bus et qu'il reparte, cela n'aurait pas valu le coup. Alors, de temps en temps, il proposait à Matsumoto de fermer lui-même la boutique et comme cela s'était bien passé la première fois, il n'avait point hésité pour la seconde.

Il était désormais dix-neuf heures trente, et il était temps pour Mikio de nourrir les animaux. il avait pris un peu de retard, plongé dans la lecture de Bakuman, un manga qu'il trouvait enrichissant. Il avait été surpris de voir l'avance du Japon par rapport aux parutions américaines, lui qui ne s'était jamais intéressé à la différence entre les deux pays. Et comme ça, il y avait plein de séries qu'il pourrait finir de lire plus vite que prévu.
Il fit de nombreux allers-retours entre l'arrière-boutique et la boutique elle-même, il passa d'une cage à l'autre, les ouvrant toutes. Quand le patron n'était pas là, il aimait sortir les animaux de leur cage pour les nourrir, c'était plus vivant. Et comme il exerçait un certain contrôle sur eux, il pouvait se permettre ce genre d'excès sans qu'il n'y ait de débordement. Et c'était aussi pour cela que les animaux aimaient quand Mikio restait tard.
Finalement, il prit réellement son temps, jouant avec eux et tout. Lorsque tout le petit monde avait regagné sa place, il constata qu'il était quasiment vingt et une heures. Il était temps pour lui de fermer boutique, avec une heure de retard.
Il sourit, vérifia les interrupteurs et tout et, après avoir salué ses amis, verrouilla la porte.

Le restaurant n'était pas bien loin. Il y parvint en quelques enjambées. Ce n'était pas non plus un palace mais la plupart des clients avaient le respect et le savoir vivre de s'habiller avec de vêtements de goût pour aller manger à l'extérieur. Lui portait un simple jean -plus de baggy, il allait encore se gameller ...-, un T-shirt noir avec plein d'imprimés colorés dessus et un gilet violet vif. Il ne passait pas inaperçu mais ce n'était pas extrêmement choquant non plus, il avait fait bien pire.
Lorsqu'il pénétra dans la salle, il fut accueilli par la mystérieuse serveuse aux cheveux d'ébène. Cette fille, la première fois qu'il était venu, s'était faite réprimander par son patron sous ses yeux parce qu'elle était froide avec les clients, et qu'elle ne faisait aucun effort pour leur parler. Mikio avait été offusqué et s'en était mêlé, même si ce n'étaient pas ses affaires. Après tout, si le patron ne désirait pas se donner en spectacle, il avait qu'à engueuler son employée ailleurs, dans un endroit plus discret. Il avait donc pris la défense de la jeune femme, disant que personne n'était parfait. Et l'incident avait été clos.
Mikio ne manqua d'ailleurs pas le regard noir que lui lança le boss quand il posa un pied dans le restaurant, mais il ne pouvait pas le refuser, il n'avait manqué de respect à personne.
Ce fut donc la fameuse serveuse qui l'accueillit. Et elle le conduisit à une petite table ronde à laquelle il prit place. Elle lui signala qu'elle allait appeler quelqu'un pour prendre sa commande. Il sourit et dit :

" Serait-ce possible que ce soit vous qui me la preniez ? "

Il lança un petit regard de défi au patron qui surveillait son employée de loin et s'empara de la carte des menus.

Le patron était en train de fixer Michiru. Normal, le client qu'elle venait d'accueillir était la personne qui l'avait aidée face à son employeur. D'ailleurs, ce jour là, elle n'avait rien demandé, elle ne voulait pas d'aide, a cause de lui, le patron ne la lâchait plus des yeux. Même si elle était physiquement présente lors de l'engueulade, elle ne l'était pas mentalement. Elle était habituée qu'on lui parlait ainsi, elle n'écoutait qu'à moitié de ce que son patron lui disait. Et si elle a voulu être là physiquement, c'était pour ne pas attirer encore plus l'attention du patron. Mais il a fallut qu'un jeune homme intervienne. Au moment où Michiru pouvait bientôt partir, il prit sa défense. Bien sur, en étant client, il avait raison, mais il n'avait pas le droit de se mêler à ce qu'il ne le regardait pas. Pour ne pas créer d'autres histoires, le gérant laissa tombé l'incident. Si elle s'en souvenait bien, elle n'avait même pas remercier son 'sauveur', lui c'était facile de prendre la défense, mais il n'avait pas les conséquences. Bon, il fallait avouer qu'il y avait une bonne conséquence, le patron n'avait plus demandé à Michiru de prendre la commande des autres, mais la mauvaise était qu'elle était maintenant devenue le centre d'attention de l'employeur. Quoi de pire pour Michiru. Enfin, d'un coté cela ne la gênait pas tellement puisqu'il était souvent très occupé. Les collègues de la jeune femme étaient eux aussi au courant de cet petit incident, bien qu'il était clos. Au départ, ils en parlaient beaucoup mais les humains étaient des êtres qui finissait par se lasser très vite, et quelques jours plus tard, ils oublièrent l'histoire.

Après avoir conduit la table à son client, Michiru lui donna la carte, le jeune homme fit alors une proposition. Il voulait que Michiru prenne sa commande. Heureusement que la jeune nippone gardait facilement son calme sinon elle serait très choquée à cause de la demande. C'était rare pour elle qu'on lui demander cela, c'était surement la première fois. Elle le regarda avec ses yeux vides de motivation. Là, elle aperçut le regard de défi en direction de son patron. Michiru se fichait qu'il aimait jouer avec son employeur, mais pourquoi fallait il l'impliquer dans tout cela ? En temps normal, la jeune femme aurait ignoré la demande, mais sous l'œil méfiant du patron, elle ne pouvait refuser. Elle laissa échapper un petit 'Haii' pour lui répondre.

Michiru sortit un petit carnet qu'elle trouva dans son tablier, puis un stylo. Comme elle pensait qu'elle n'aurait pas à faire de commande, le stylo qu'elle avait pris n'écrivait plus. Elle n'était pas tellement dérangée par cela puisqu'elle avait une bonne mémoire. Et puis que pouvez il commander ? Il était seul. Enfin, on ne pouvait se laisser tromper par les apparences. Même si il avait l'air d'un gamin, il pouvait avoir un gros appétit. Elle le regarda, il semblait être à fond dans ses choix. Elle finit par l'interrompre, elle ne voulait passer la soirée à attendre une commande. Quoique, pour l'instant, elle ne faisait rien alors que les autres étaient en train de travailler. Oui, c'est une fille très compliquée.

« Avez vous fait votre choix ? »

Alors qu'elle était toujours sur le même client, une collègue prit la commande du client d'à coté. Elle semblait si à l'aise. Non pas que Michiru rêvait d'être comme elle, bien au contraire, elle se demandait juste quand est ce qu'elle pourrait finir la soirée. Son esprit sortit peu à peu de son corps. Elle était en train de rêver. Puis lorsque son client parla, elle se réveilla. Elle savait, être serveuse n'était pas fait pour elle, aucun métier était fait pour elle, elle n'avait pas d'ambition. Et elle n'avait pas d'autre métier à part celui la. Puis quelques minutes avant la première question, elle vit une bouteille d'eau sur une table voisine.

« Que désirez vous boire ? »

Elle ne s'en sortait pas trop mal. Heureusement qu'elle avait vu la bouteille d'eau sinon elle allait encore se faire réprimander par son patron. Cela ne la dérangeait pas non, mais elle ne voulait créer des histoires.

Mikio sentit assez rapidement qu'il avait bien fait de revenir. La soirée risquait d'être fort intéressante. Il n'était pas très doué pour cerner les gens, mais il avait tout de même compris que la jeune serveuse -qui semblait tout de même plus âgée que lui- n'avait pas l'air très encline à la conversation. En effet, elle évitait soigneusement de croiser son regard, et elle paraissait attendre qu'il lui pose lui même les questions, à croire qu'elle n'avait jamais pris de commande de sa vie. Incrédule, il se demanda alors quel genre de tâche elle exécutait en temps normal pour être aussi en proie au malaise face à un banal client. Surtout que Mikio n'était franchement pas effrayant, avec sa bouille de gamin ! Qu'importe, il était tout de même ravi de voir qu'elle ne s'était pas défilée et qu'elle avait accepté de prendre sa commande d'un "haii" discret. Malgré le fait qu'elle semble peu à l'aise avec les gens, elle avait relevé le défi de changer ses habitudes, si l'on pouvait appeler cela un défi. En tout cas, il jeta un bref coup d'oeil par-dessus l'épaule de la brune et constata que le patron n'avait pas bougé d'un millimètre, les yeux rivés sur son employée. Sans doute voulait-il la tester, voir ce dont elle était capable. Il sourit.

Peut-être avait-il commis une erreur la dernière fois. Après tout, s'immiscer dans une histoire ne le concernant pas, était une sorte d'atteinte à la vie privée d'autrui. Bien que la dispute ait eu lieu sous les yeux des clients, ce qui en soit était franchement impoli de la part du patron, en tant que client il aurait mieux fait de se concentrer sur son assiette, de terminer rapidement son repas et de filer avant que l'orage n'éclate. Et puis, il ne savait pas ce qui s'était passé après, dans les "coulisses". Après tout, sur le moment l'homme bourru s'était montré plutôt conciliant, mais qui sait ce qu'il avait dit à la jeune femme une fois le joyeux luron troubleur de fêtes était parti ? Il n'en avait aucune idée.
Ainsi, en donnant sans l'accord du patron à cette fille sa chance d'effectuer une commande -parce qu'elle ne semblait vraiment jamais avoir fait cela de sa vie, peut-être rachèterait-il son erreur.
Mikio observait les gestes de la serveuse. Elle semblait nerveuse, tapotant le carnet qu'elle avait sorti de la poche de son tablier avec son stylo. Elle lui demanda alors s'il avait fait son choix, mais, jusque là captivé par les gestes débutants de la jeune femme, il en avait complètement omis la carte. Ah, quelle attitude déplorable !

" Oh, excusez-moi, je n'ai pas encore regardé. "

Mikio, pour se faire pardonner, fourra son nez dans la carte des menus et la parcourut tranquillement. Ces plats ne lui disaient rien du tout. Lui, ce qu'il connaissait, c'était spaghettis à la bolognaise, hamburgers frites, et compagnie. Il savait tout de même ce qu'était un sushi, après tout il y avait des restaurants japonais à Boston, mais bon. Il remarqua un plat dont le nom ne lui disait rien, il jeta un oeil à la serveuse et pour la taquiner, il demanda :

" Dites-moi, je ne connais pas ce plat, me le conseillez-vous ? "

Mikio ne manqua pas les regards curieux qu'elle lança vers la table voisine où l'une de ses collègues prenait une commande avec une adresse remarquable. Elle semblait très bien connaître son métier et la serveuse à sa propre table parut chercher à apprendre de sa méthode. Et puis, soudainement elle lui demanda ce qu'il voulait boire. Tiens, il n'avait point pensé à cela. Il réfléchit, et finalement il demanda tout simplement une bière Japonaise Asahi. Cela lui changerait sans doute des bières américaines auxquelles il était habitué depuis fort longtemps. Cela ferait sans doute bizarre de voir ce jeune homme aux allures de collégien boire de l'alcool, surtout qu'il était mineur, mais ça il ne le savait pas parce qu'aux Etats Unis il était majeur. Il ne savait pas qu'ici la majorité s'élevait à vingt ans.

[désolée; un peu court ><]

Avait il finit de la regarder comme cela ? Heureusement que Michiru se fichait de comment on l'a regardait sinon elle l'aurait pris pour un pervers ou alors pour un sadique qui aimait voir la jeune femme galérer. Elle avait même finis par poser la question de savoir si il avait fait son choix pour que le client se concentrait sur la carte. C'était pas très bien de sa part de rester là à l'attendre alors qu'elle avait d'autres préoccupations. Michiru n'était pas indispensable pour le restaurant, mais elle faisait bien son travail, dès qu'elle voyait un plat sur le comptoir de la cuisine, elle l'amenait directement au client. Le brun lui annonça qu'il n'avait pas encore choisi. Il devrait surement revenir d'un autre pays, Michiru pouvait l'entendre. Mais la serveuse s'en fichait de sa vie, elle voulait juste terminer rapidement cette commande pour continuer son travail. Elle le regarda se plonger dans la carte. On aurait dit un vrai gamin. Il ne devrait pas être majeur. La nippone ne comprenait pas pourquoi il avait choisi elle pour le servir, il l'avait déjà vu à l'œuvre, elle n'était pas douée pour prendre une commande, ou plutôt elle ne faisait rien pour pouvoir en prendre une.

Elle remarqua que son client prenait son temps pour choisir, Michiru regarda à nouveau dehors. Oui, elle aimait beaucoup rêver, surtout que en ce moment même le brun lui laisser le temps pour. Bien sur, elle était dos à son patron pour ne pas qu'il remarque qu'elle était ailleurs. Mais de toute façon, il était difficile pour quelqu'un de différencier si Michiru était présent ou non : elle affichait toujours la même tête. La serveuse aurait pu rester éternellement ainsi, mais elle aperçut le début de la tête de son client qui ressortait de la carte. Cela ne préservait rien de bon pour Michiru. Cette dernière avait raison, il lui montra un plat du doigt et lui demanda si elle le lui recommandé. La serveuse ne savait pas si il le faisait exprès ou pas et ne cherchait pas à savoir. Si oui il n'avait réellement rien à faire de la soirée et il était vraiment bizarre, si non, il était effectivement un japonais qui venait de redécouvrir son pays natal. Le plat montré était un donburi au poulet. Il devrait revenir d'un pays loin. Quels japonais ne connaissaient pas ce plat ? Ils étaient rare et il a fallut que ce soit le jeune homme. Michiru lui expliqua que ce plat était un des plats connus du restaurant et qu'il ne pouvait qu'être satisfait. Par chance, une autre collègue de la jeune femme apporta un donburi à une table voisine.

« C'est cela le donburi. »

Après lui avoir montré le plat, elle demanda si c'était ce qu'il voulait comme plat. Le jeune nippon commanda une bière japonaise. Elle était partit pour lui en prendre une, mais son jeune client n'était pas encore majeur, et c'était interdit au Japon de consommer l'alcool avant d'être majeur. D'habitude, elle l'aurait comme même apporter, après tout, elle n'était pas censée vérifier les âges de leur client, mais Michiru était surveillée.

« Excusez moi, mais quel age avez vous ? Vous ne pouvez consommer de l'alcool avant d'être majeur, donc 20 ans. »

Michiru avait dit la phrase d'un ton monotone. Elle avait beaucoup parlé d'après elle. La serveuse venait de dépasser le nombre de phrase qu'elle avait parlé l'année d'avant. Peu être qu'elle était sur le point de changer ? Non, impossible, ce n'était pas avec un client pareil que Michiru allait changeait. La nipponne ne le détestait pas non plus, détester était un sentiment trop fort pour elle. Celle ci était aussi étonnée, même face à son comportement pas très sympathique, le jeune homme ne paraissait pas énervé, bien au contraire, il l'acceptait telle qu'elle était. C'était surement dans sa nature de gamin.

[Ne t'inquiètes pas, c'est pas la quantité qui compte ]

La jeune serveuse n'avait vraiment pas l'air ravie d'être ici, à cette table, face à un Mikio indécis. Même ayant le nez dans la carte des menus, il sentait que le regard de la jeune femme n'était pas posé sur lui, ce qui signifiait qu'elle avait sans aucun doute l'esprit ailleurs. Il ne pouvait le lui reprocher, le métier de serveur n'était pas des plus passionnants et il parlait en connaissance de cause, ayant testé les fast-foods de McDonalds en guise de job d'été. Il était peut-être plus facile de s'évader un instant dans un grand restaurant peuplé de personnel et où les clients prenaient leur temps pour manger. Les fast-food eux, voyaient toujours leurs comptoirs envahis de clients. A l'époque où le bonhomme travaillait là-dedans, il n'avait jamais ne serait-ce qu'une seconde de répit ! Entre servir les clients, vérifier qu'il n'y avait personne au McDrive, vérifier également s'ils n'étaient pas à court d'un produit, passer un coup de balai en salle parce que des gamins avaient fait un remake de Star Wars avec leurs frites ... Mais si ça se trouvait, ce n'était pas bien différent dans les grands restaurants, c'étaient juste d'autres tâche à accomplir. Mais cette fille semblait différente, il ne la connaissait ni d'Adam ni d'Eve mais elle lui paraissait dégager une aura étrange. Comme si ce qu'elle faisait la désintéressait totalement, que c'était une perte de temps profonde. Il ne savait comment dire cela. Qu'importe, en tout cas cela l'amusait beaucoup de la voir tenter de faire ce qu'elle semblait faire rarement. Mikio se mêlait peut-être de ce qui ne le regardait pas, en ayant voulu absolument que ce soit elle qui prenne sa commande, en la forçant à faire une tâche dont elle n'avait pas l'habitude. Mais il cherchait à comprendre ce qui se tramait dans la tête de cette serveuse qui avait tout l'air d'avoir constamment la tête dans les nuages. Ou les étoiles, puisqu'il faisait nuit.

Il avait pensé cesser de la mettre au défi et de l'importuner après s'être plongé dans la carte des menus mais finalement il tomba devant un plat qu'il ne connaissait pas du tout, et quand il lui demanda ce que c'était, ce n'était ni pour se ficher d'elle, ni pour lui faire perdre son temps. Il avait beaucoup de choses à rattraper concernant sa culture natale, à commencer par la nourriture. Il était vraiment curieux de savoir ce que le Japon lui offrirait pour ravir ses papilles, lui qui était un parfait gourmand. Sûrement que la serveuse prendrait cela comme une nouvelle manière de lui faire perdre son temps précieux, mais pour une fois qu'il n'y avait que de l'innocence dans sa question ! Il était vrai qu'il avait mis son nez dans les affaires des autres en intervenant entre elle et le patron, puis en demandant à être servi par elle également, mais il avait décidé de s'en arrêter là.
Elle lui expliqua alors que ce qu'il lui montrait se nommait le donburi au poulet et elle désigna un plat qu'une collègue apportait. Ca avait l'air drôlement savoureux ! Il s'était décidé pour son repas. Il commanda donc sa bière, et puis ajouta :

" Et donc je prendrai le donburi ! Merci de m'avoir expliqué. "

Il adressa un léger sourire à la demoiselle tout en croisant les bras. Il faisait un peu tâche dans le beau restaurant traditionnel où la plupart des clients étaient bien habillés, alors que lui portait des vêtements de tous les jours, assez ... voyants.
La jeune femme allait partir donner la commande aux cuisiniers en arrière-salle mais elle parut se raviser puisqu'elle resta plantée là et se mit à le dévisager. Elle lui demanda son âge, et lui expliqua qu'il ne pouvait pas consommer d'alcool avant d'être majeur, c'est à dire vingt ans. Ben oui, normal ! Euh, attendez .... Vingt ans ?!
Mikio écarquilla les yeux. Il nageait en plein délire, là ! Il était tout juste majeur, pourquoi ne pourrait-il pas consommer sa bière tranquillement ? Et puis pourquoi lui disait-elle que la majorité s'élevait à vingt ans, c'était différent au Japon ? Si c'était le cas, il avait des tas de choses à apprendre ! Il se sentit donc obligé de demander, et pour ne pas passer une énième fois pour le boulet qui se plaisait à casser les pieds des autres, il se justifia :

" Euh ... Excusez-moi ... au Japon la majorité est à vingt ans ? Vous me trouvez peut-être bizarre ", ajouta-t-il, "mais en fait j'arrive tout droit des Etats - Unis, je n'ai pas grandi ici. Du coup je ne connais rien aux coutumes ... "

Il était tout désolé d'autant importuner la demoiselle qui devait vraiment avoir mieux à faire que d'expliquer tous les moeurs du Japon à un client aux allures de gamin ! Oui franchement, elle avait mieux à faire. Mais bon, il venait de découvrir deux choses primordiales en moins de cinq minutes, non seulement l'alcool ne se consommait qu'à partir de vingt ans, la majorité, mais en plus ....... Ben non rien de plus tout compte fait, savoir que ce qu'il allait manger s'appelait donburi n'était pas une chose primordiale en soi.

" Bon eh bien, je prendrai une limonade alors. "

hj : ah cool alors (: parce qu'en ce moment l'inspi et moi xD

Son client avait donc choisit de commander un donburi. Et il remercia Michiru de lui avoir expliqué. C'était surement la première fois depuis longtemps qu'on la remercia. Pendant un instant, elle sentit un sentiment étranger, mais celui ci disparut très rapidement. Michiru qui gardait toujours la même expression sur son visage. La commande a été enfin prise. Elle partit tout d'abord en direction de la caisse pour noter la commande, puis la serveuse alla en cuisine pour demander le donburi au poulet, ou plutôt, elle donna la commande qu'elle venait de prendre. Michiru s'apprêtait réellement à prendre la bière, mais pour des raisons déjà dites, elle préféra demander l'age au jeune homme. Celui ci se justifia, il venait donc des Etats-Unis. N'ayant jamais connus d'autres pays que le Japon, il était normal pour Michiru et pour tous les autres japonais d'approuver que la majorité était à 20 ans. Elle conclut donc que pour les Etats-Unis, les adolescents étaient donc majeurs plus tôt.

La serveuse hocha doucement de la tête pour confirmer ces paroles. Son jeune client paraissait désolé. Il ne devrait pas l'être. En effet, il a défendu Michiru face à son patron, défier celui ci, ce n'était pas parce qu'il ne connaissait pas les coutumes au Japon qu'il devrait désolé. Enfin, la jeune femme ne chercha pas à comprendre le raisonnement. Son client demanda alors une limonade à la place de la bière. Elle hocha à nouveau la tête et partit changer la commande d'avant. On pouvait constater qu'il revenait effectivement d'un autre pays. Il n'y avait pas beaucoup de jeunes qui prenait de la limonade.

Michiru prit alors une limonade. Elle enleva d'abord la capsule puis la posa sur la table ronde. En attendant que le donburi soit prêt, la serveuse s'occupa d'autres tables, elle les rangeait ou apportait des plats. Quelques minutes plus tard, elle vit que le plat de son jeune client était prêt. Elle s'apprêtait à le prendre quand sa collègue brune versa 'accidentellement' de l'eau chaude sur la main de la jeune femme. Ce n'était pas la première fois que cette personne lui jouait des tours. Michiru, au contact de l'eau chaude fit une petite mine de douleur, sa main droite était toute rouge. Sa collègue avait profité le seul moment d'inattention de son patron pour avoir renverser de l'eau chaude. Il n'y avait surement pas de témoin, et Michiru ne voyait pas la peine de la dénoncer ou autre. Elle se fichait, après tout, ce n'était que des douleurs physiques, ce n'était rien pour elle. La nippone prit des deux mains le donburi puis s'approcha de la table de son client. Elle posa le bol sur la table.

Comme si l'eau chaude n'était pas assez, cette même personne poussa Michiru. Cette dernière aurait pu renverser le bol qu'elle venait d'apporter, mais heureusement, elle prit appuie sur la table tout en faisant attention de ne pas faire tomber quelque chose. La brune pouvait faire tout ce qu'elle voulait puisque son patron était partit à la caisse. Michiru se releva de la table puis s'inclina pour dire qu'elle était désolée. Il ne fallait pas que son patron l'a remarqua à nouveau, elle n'avait pas le droit à d'autres erreurs. Le gérant aperçut alors que Michiru s'était inclinée, il se douta alors de quelque chose. L'homme s'approcha de la table puis demanda au client.

« Je suis désolé, j'espère qu'elle ne vous a pas déranger, elle est encore incompétente, je vous pris d'excuser ses erreurs. »

Tous les patrons étaient comme ça. Ils ne cherchaient pas à découvrir ce qu'il s'était passé, pour eux, l'employé à problème était toujours le même et ici, c'était Michiru. Cette dernière resta silencieuse comme d'habitude.

[Désolé, je n'avais pas vu le post >.<]

Alors que la serveuse avait filé en cuisine donner la commande, Mikio jeta un coup d'oeil autour de lui. Il y avait beaucoup d'hommes d'affaires dans ce restaurant, on les reconnaissait aisément à leurs costumes trois pièces sans un pli. Il avait vaguement entendu parler qu'au Japon, certains salary-men ne rentraient pas toujours chez eux le soir, selon la distance qui séparait leur boulot de leur domicile familial. Et souvent ils participaient à des dîners d'affaire où l'alcool primait plus qu'autre chose. Curieux, il observa le plus discrètement possible la table d'hommes d'affaires en face de lui. La discussion allait bon train, ils parlaient fort, et riaient bruyamment. Ce n'était pas que Mikio n'aimait pas le bruit, mais il entendait assez de piaillements d'oiseaux, de miaulements et jappements en tout genre à la journée pour avoir encore envie d'enchaîner avec des discussions bruyantes le soir. Mais bon, il lui suffisait de ne pas se focaliser sur ce groupe-là et de penser à autre chose et tout irait bien.

Etant donné que la serveuse était un peu loin et qu'il ne s'occupait pas d'elle pour le moment, Mikio ne put voir la tentative de sa collèguer de la désarçonner en lui renversant de l'eau chaude sur la main. Elle revint l'air de rien en face de lui, lui apportant son donburi fumant. Ouah, le service était plutôt rapide ! Ou peut-être que ce n'était pas un plat long à réaliser ? (je confirme !). Souriant, il enleva ses coudes de sa table pour laisser la jeune femme poser son plat, mais au même moment une collègue passa près de la brune et la poussa violemment, si bien qu'elle faillit renverser le donburi et faire un ravage sur la table, emportant la nappe avec elle. Mais, habile, et se rattrapa au bord de celle-ci et le danger fut vite écarté. Mais Mikio n'échappa pas au regard à demi-satisfait de la collègue qui s'éloignait avec un sourire aux lèvres, celui neutre de la serveuse qui semblait habituée à ce genre de persécutions. C'était fait exprès, il n'était pas bête tout de même ! Mais il était profondément choqué que l'on puisse s'abaisser à de tels coups bas.
Mais avant qu'il n'ai pu réagir, la serveuse lui fit une courbette tout en s'excusant. Il allait lui dire que ce n'était rien, que c'était un accident -il avait bel et bien décidé de ne plus s'en mêler -, mais au même moment le patron arriva à la hauteur de sa table, fixant d'un air mauvais son employée.

« Je suis désolé, j'espère qu'elle ne vous a pas déranger, elle est encore incompétente, je vous pris d'excuser ses erreurs. »

Alors là, c'était le pompom ! Il ne savait pas qu'en général au Japon ce genre d'événement étaient vite enfouis et en général le patron faisait quelques excuses au client pour mieux réprimander l'employé. Car en effet souvent il était assez doux devant le client et la colère explosait en coulisses, l'employé se faisait reprocher d'avoir mal travaillé mais en plus d'avoir forcé son supérieur à présenter des excuses !
Mais Mikio était doté d'une franchise implacable et il ne pouvait laisser cela impuni. Alors, quand le patron osa proférer de telles choses sur sa serveuse, il ne put s'empêcher de dire tout haut ce qu'il pensait tout bas, et oublia une fois de plus, emporté par l'indignation, des conséquences désastreuses qui pourraient s'appliquer sur la jeune femme.

" Elle serait sans doute moins incompétente si vous la laissiez plus souvent prendre les commandes ! Je pense que vous devriez plutôt surveiller votre autre employée ... " dit-il en pointant discrètement du doigt la femme qui avait poussé Michiru. " La jalousie lui fait commettre de drôles d'actes puérils, monsieur, si je puis me permettre. "

Du haut de ses dix-huit ans, Mikio n'avait peur de rien. Espérons juste que cela ne se termine pas en pugilat ! En plus, si la discussion s'attardait, son donburi serait froid !